I : INTERET CLINIQUE DE LA CYTOGENETIQUE DANS LES
HEMOPATHIES MALIGNES
La recherche des anomalies chromosomiques dans les hémopathies malignes est un élément
essentiel dans la prise en charge de ces maladies. Elle permet de i : confirmer, voire d’établir
le diagnostic clinique, ii : de suivre l’évolution d’un patient (contrôle de rémission complète,
dépistage d’une rechute, détection de la maladie résiduelle), iii : d’évaluer le pronostic, et
iv : d’adapter le protocole thérapeutique.
Le caryotype, la FISH et la biologie moléculaire font partie aujourd’hui du bilan d’une
hémopathie.
Les anomalies cytogénétiques de structure altèrent souvent des gènes situés aux points de
cassure de certains remaniements (oncogènes, gènes suppresseurs de tumeurs, gènes de
facteurs de croissance ou de leurs récepteurs ou encore gènes des immunoglobulines)
II : CARACTERISTIQUES DES ANOMALIES CHROMOSOMIQUES
DES HEMOPATHIES MALIGNES
Les anomalies chromosomiques des hémopathies maligne
s se caractérisent par leurs
caractères i : acquis, limité aux seules cellules tumorales, ii : clonal, toutes les cellules
possèdent la même anomalie primaire. Un clone étant défini par au moins 2 cellules
possédant le même chromosome surnuméraire ou la même anomalie de structure ou au moins
3 cellules lorsqu’il y a perte d’un même chromosome.
Les anomalies chromosomiques des hémopathies malignes peuvent être non aléatoires :
retrouvées plus souvent que ne le voudrait le hasard (la trisomie 8 dans la leucémie aigue
myéloïde LAM) ou plus au moins spécifiques d’un type de leucémie (la t(15;17) dans la
leucémie aigue lymphoïde LAM3 ou la t(8;14) dans LAL3)
Les anomalies chromosomiques des hémopathies malignes peuvent être primaires (présentes
dans toutes les cellules du clone tumoral) ou secondaires surajoutées au cours de l’évolution
à l’anomalie primaire.
La fréquence des anomalies chromosomique est de l’ordre de 95% dans les LMC, de 70 à
80% dans les leucémies aiguës lymphoblastiques, et de 50% dans les leucémies aiguës
myéloïdes.
Un caryotype normal est en général un facteur de bon pronostic, contrairement aux anomalies
complexes.
Un grand nombre de ces anomalies chromosomiques sont associées à un type cytologique
et/ou immunologique particulier et correspondent parfois à des entités clinico-biologiques, de
bon ou de mauvais pronostic.
III-: ANOMALIES CYTOGENETIQUES DANS LES PATHOLOGIES DE
LA LIGNEE MYELOIDE
III-1 Anomalies cytogénétiques dans les Syndromes myéloprolifératifs.
Les syndromes myéloprolifératifs sont des hémopathies malignes caractérisées par la
prolifération clonale des cellules myéloïdes. La leucémie myéloïde chronique (LMC), la
polyglobulie de Vaquez, la thrombocytémie essentielle et la myélofibrose primitive
constituent les principales pathologies du groupe des syndromes myéloprolifératifs.
III-1-1 Apport de la génétique dans la LMC
La LMC a bénéficié très tôt d’un marqueur biologique : le chromosome de Philadelphie
(Ph1). Ce marqueur identifié en 1960 par Nowell et Hungerford à Philadelphie, a été la
première anomalie spécifique d’un processus malin. Il fut dès lors reconnu comme marqueur
spécifique (non pathognomonique) dans la LMC.
Il s’agit d’une translocation réciproque entre les chromosomes 9 et 22, cassés respectivement
en 9q34 et 22q11. Il apparaît parfois sous une forme variante (moins de 10% des cas) se
traduisant par des translocations complexes impliquant un ou plusieurs chromosomes en plus
du chromosome 9 et du chromosome 22.
L’équivalent moléculaire du chromosome Ph1 est le gène de fusion BCR-ABL, transcrit en un
ARNm hybride et traduit en une protéine de 210 KDa à forte activité tyrosine kinase, jouant
un rôle dans la leucémogénèse.
Dans certains cas, le chromosome Ph1 peut être masqué à cause de la taille du fragment
transloqué qui est submicroscopique, on a alors recours à la cytogénétique moléculaire
(hybridation in situ : FISH) ou à la PCR en temps réel.
La recherche du chromosome Philadelphie est nécessaire pour confirmer le diagnostic de la
LMC et pour surveiller l’évolution sous certains traitements anti mitotiques.
III-1-2 Apport de la génétique dans les autres syndromes myéloprolifératifs
Il n’y a pas d’anomalies chromosomiques spécifiques.
La découverte en 2005 de la mutation JAK2 V617F a permis aux trois autres syndromes
myéloprolifératifs classiques (polyglobulie de Vaquez, thrombocytémie essentielle et
myélofibrose primitive) de bénéficier à leur tour d’un marqueur moléculaire, même si cette
mutation n’est pas retrouvée chez tous les patients présentant ces pathologies.
JAK2 est une protéine à fonction tyrosine
kinase, de la sous-famille des protéines
JAK (pour Janus Kinase) qui sont des
molécules de signalisation intracellulaire
non réceptrices. La mutation transversion
G→T du gène JAK2 au niveau du
nucléotide 1849 entraine la substitution de
la valine en position 617 par une
phénylalanine (V617F). Cette mutation somatique est détectée chez plus de 90 % des patients
atteints de polyglobulie de Vaquez, mais aussi chez plus de 50 % des patients atteints de
thrombocytémie essentielle et chez environ la moitié des patients atteints de myélofibrose
primitive
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